Élodie Gaden (janvier 2006)
Méthode de la dissertation
Répartition du temps pour la dissertation en 4 heures
- Analyse du sujet + trouver la problématique : 30 minutes
- Elaboration du plan détaillé : 30 minutes
- Rédaction de l'introduction et esquisse de la conclusion : 15 minutes
- Rédaction du développement : 2h30
- Relecture : 15 minutes (ne pas négliger cette étape : il FAUT relire au moins 2 fois : une fois pour le sens général ; une autre fois pour les fautes d'orthographe, et de conjugaison)
Dans le cas d'une dissertation en un temps moins restreint (en 5 heures notamment), la répartition du temps doit privilégier l'analyse du sujet, l'élaboration de la problématique, et du plan détaillé. La rédaction du développement ne doit pas prendre bien plus de 2h30 à 2h45.
Première étape : analyse de la citation au brouillon
C'est l'étape la plus importante : il faut y passer du temps et ne surtout pas la négliger car c'est l'analyse qui va déterminer la problématique puis le plan et TOUT le sujet.
- Recopier le sujet sur son brouillon au centre de la feuille (pour faciliter le travail d'analyse et avoir plus de place)
- Est-ce une question ? est-ce une citation ? ou autre ?
- Souligner les mots importants : on peut utiliser des couleurs et autres codes pour souligner, encadrer, surligner les différents mots... Chaque mot doit être analysé, il ne faut pas faire l'impasse : on peut toujours tirer du sens... si un mot te gêne ou si tu ne vois pas pourquoi il est utilisé ici, il faut essayer de le relier aux autres mots pour comprendre : mais ne jamais laisser un mot ou une expression de côté. Tous les mots du sujet comptent.
- Repérer les spécificités de la citation en tant qu'énoncé : on peut notamment prêter attention à la ponctuation (une interrogation ; une affirmation ; les points de suspension...) et au type d'écriture (un ton ironique ; une métaphore ; une litote...)
- Repérer s'il y a des réseaux d'oppositions entre les termes employés
Parfois, il y a dans le sujet des mots qui se contredisent, ou des mots en opposition, qui donnent déjà une idée du problème.
- Ensuite, il faut se convaincre soi-même de l'intérêt de ces mots : pourquoi tel mot est important ? qu'est-ce qu'il nous indique ? C'est l'étape majeure de l'interprétation du sujet.
Deuxième étape : dégager les enjeux du sujet et la problématique
A la fin de l'analyse du sujet, on doit avoir une idée générale d'ensemble et aussi plusieurs idées plus fines que l'on va développer.
La problématique est cette idée générale du problème que pose le sujet.
La problématique doit être claire et courte : elle ne doit pas faire des lignes et des lignes...
Troisième étape : trouver un plan
Comment organiser le plan ? On part du plus général et du plus facile pour aller au plus difficile et au plus intéressant. Il peut y avoir plusieurs types de plans pour un même sujet... Il n'y a pas de plan parfait.
Certains sujets appellent un plan du type : I. Thèse II. Antithèse III. Synthèse (souvent quand le sujet est une affirmation). D'autres sujets appellent un plan plus progressif.
Quatrième étape : rédiger l'introduction
L'introduction est la première impression qu'on donne au correcteur, il faut donc particulièrement la soigner, en la travaillant longuement au brouillon d'abord.
L'introduction est composée de trois sous-parties :
- l'accroche : il s'agit d'une phrase introductive qui met en bouche le lecteur ou le correcteur de la copie. Cette phrase est assez vague et générale. Dans certains sujets, elle peut être la définition de la thématique, ou bien on peut faire la citation d'un auteur que l'on connaît...
- la problématique : l'énoncé de la problématique doit être claire et courte, et ne pas s'étendre sur plusieurs lignes
- l'annonce du plan : « nous verrons d'abord (...) ensuite (...) enfin... »
La construction de l'introduction suit une progression « en entonnoir » ou en pyramide inversée, c'est-à-dire qu'il faut aller du plus vague au plus précis.
La dissertation de littérature comparée
La dissertation de littérature comparée doit suivre les mêmes indications et la même méthologie, mais en intégrant une réflexion sur le corpus d'œuvres du programme de comparé. Il ne faut pas consacrer une partie à chaque œuvre, mais envisager la réflexion de façon générale. En revanche, à l'intérieur des sous-parties, on peut se permettre de réaliser un "catalogue" des œuvres.
On notera que la dissertation de littérature comparée ne vise en aucun cas à faire l'inventaire des ressemblances et points communs des œuvres, mais au contraire qu'elle est l'occasion d'une interrogation sur les différences, variantes et variations qui animent les composantes du corpus.
Pour plus de détails et des exemples de dissertations de littérature comparée, on consultera l'ouvrage de D. Chauvin et Y. Chevrel, Introduction à la Littérature Générale et comparée, Dunod, 1996.
Exemple d'analyse
Nous avons choisi un sujet qui porte sur le genre de l'autobiographie, à partir d'une citation de Nathalie Sarraute, tirée de Enfance:
Pourquoi faire revivre cela, sans mots qui puissent parvenir à capter, à retenir ne serait-ce qu'encore quelques instants ce qui m'est arrivé... ?
1ère étape : analyse de la citation
Il s'agit de la citation d'un auteur, Nathalie Sarraute, tirée d'un livre, Enfance, qui se trouve être une autobiographie. il s'agit donc d'une réflexion d'auteur sur la biographie, puiqu'elle est elle-même confrontée au problème de l'écriture de soi.
Les mots importants
- le premier mot pourquoi est très important, car il insère une question posée au lecteur de façon abrupte
- revivre : le préfixe re- exprime l'idée que le livre, l'écriture permet de faire vivre, une nouvelle fois, une partie de sa vie.
- cela : pourtant, N. Sarraute n'est pas clair sur ce que l'auteur revit en écrivant son autobiographie : "cela" est un terme vague, et indique bien que pour l'auteur lui-même, rien n'est défini.
- sans mots : cette expression fait paradoxe : comment un écrivain peut-il écrire un livre "sans mots" : N. Sarraute pointe ici le problème de l'indicible. Tout ne peut pas être exprimé, tout n'est pas aisé à écrire, et les mots manquent parfois. Lorsque les mots manquent, peut-être que c'est au tour de l'interrogation ou des points de suspension de prendre le relais ?
- est arrivé : l'utilisation du passé composé montre que les évènements racontés font partie d'un vécu passé, coupé du présent. Pourtant, l'autobiographie est peut-être ce moyen qu'a l'auteur de lier passé et présent, de comprendre le passé à la lumière du présent, et inversement...
La ponctuation
L'auteur pose ici une question, ce qui appelle explicitement le lecteur à la réflexion. Les points de suspension s'inscrivent dans la même idée : ils sont là pour montrer que l'écriture ne suffit pas, elle nécessite une interrogation. Les points de suspension esquisse la réflexion du lecteur.
2ème étape : dégager les enjeux du sujet et la problématique
On pourrait dès lors formuler la problématique ainsi : le sujet pose le problème du « pourquoi et comment écrire son autobiographie ? » c'est-à-dire que N. Sarraute nous interroge sur les raisons qui poussent à écrire sur soi et les stratégies à élaborer pour écrire.
3ème étape : trouver un plan
On opte ici pour un plan progressif :
- Le passé, une aventure existentielle : l'objectif de l'écriture autobiographique paraît claire pour l'auteur : il s'agit de décrire le passé et de le revivre pour mieux le comprendre.
« faire re/vivre cela » ; « ce qui m'est arrivé » (passé composé)
(le I. part d'un constat simple, contenu dans la citation et répond déjà un peu à la question « pourquoi ? »)
- Le passage par l'écriture : une prouesse et une nécessité :
l'écriture permet de dire l'indicible et de cerner ce qui est difficile à cerner...
« cela » : terme flou : les souvenirs sont flous
« sans mots » : quels mots ? quel langage ?
(le II. répond à la question « comment ? »)
- Le passé n'est pas la seule raison :
l'écriture autobiographique permet de mieux se comprendre et de mieux se cerner pour l'auteur qui écrit
(le III. répond à la question « pourquoi ? », mais de façon approfondie)